mercredi 1 juillet 2020

Les phares




L'emploi de la lumière pour guider les navigateurs pendant la nuit remonte à la plus haute antiquité. On citait comme une des sept merveilles du monde le fanal élevé sur la petite île de Pharos, voisine du port d'Alexandrie, sous le règne de Ptolémée Philadelphe.
De là vient le nom donné depuis à tous les appareils semblables.
Les anciens phares, dits phares de réflexion, se composaient d'un miroir sphérique ou parabolique en métal poli, au foyer duquel était placée une forte lampe. Ces phares sont aujourd'hui remplacés presque partout par des appareils à verres lenticulaires ou phares à réfraction, beaucoup plus puissants et moins dispendieux, inventés au commencement de ce siècle par Fresnel, le créateur de l'optique moderne.
Les rayons lumineux partis d'un point situé au foyer d'une lentille convergente forment, après avoir traversé la lentille, un faisceau de lumière parallèle à l'axe principal.
Mais il faut pour cela que le diamètre de la lentille soit suffisamment petit par rapport aux rayons de courbure de ses deux faces ou, en d'autres termes, que l'ouverture de la lentille ne soit pas trop grande. Dans le cas contraire, les rayons réfractés formeraient, en grande partie, un faisceau divergent dont l'intensité diminuerait rapidement avec la distance. Or, c'est précisément là ce qu'il faut éviter S dans la construction d'un phare, où il est cependant nécessaire, pour obtenir un éclairage intense, d'employer des lentilles d'une grande étendue superficielle.
Cette difficulté a été heureusement tournée par Fresnel, au moyen des lentilles dites annulaires ou à échelons, qui, tout en présentant une large surface, réfractent néanmoins dans des directions sensiblement parallèles tous les rayons émis par une source de lumière placée à leur foyer.
La figure (287) représente la section d'une de ces lentilles. A est une lentille plan-convexe dont l'ouverture est d'environ 15 degrés, et qui est entourée d'une série d'anneaux B, C, D, dont les surfaces convexes sont calculées de façon que le foyer de chaque anneau coïncide avec le foyer de la lentille centrale.
Il résulte de cette disposition que si une lumière intense est placée au foyer d'une telle lentille, tous les rayons lumineux formeront, après l'avoir traversée, un large faisceau parallèle qui, par un temps clair, pourra pénétrer à de très-grandes distances, son intensité ne s'affaiblissant que par son passage à travers l'atmosphère. C'est sur ce principe que repose la construction des phares modernes ou à réfraction. Dans les phares de premier ordre, qui peuvent éclairer la côte jusqu'à 15 ou 20 lieues en mer.




La source de lumière est une lampe Carcel à quatre ou cinq mèches concentriques*.
Autour de la flamme sont disposés, à une égale distance et à la même hauteur, plusieurs lentilles annulaires (fig. 288), de forme identique, d'où partent autant de faisceaux de lumière parallèles. Pour que ces divers faisceaux puissent éclairer succesivement tous les points de l'horizon, un mécanisme d'horlogerie fait tourner le système de lentilles autour de son axe vertical où se trouve la flamme.
Un observateur placé à une grande distance aperçoit le feu chaque fois qu'un faisceau lumineux passe devant lui; puis il cesse de le voir jusqu'au moment où la lentille suivante lui ramène un nouveau jet de lumière. Chaque apparition du feu se trouve ainsi suivie d'une éclipse dont la durée dépend de la vitesse de rotation de l'appareil et du nombre de ses lentilles.
Telle est la disposition des phares à éclipses ou à feux tournants. Quand plusieurs de ces phares sont situés à proximité sur une même côte, on fait varier pour chacun d'eux la durée et la succession de leurs éclipses, ce qui permet aux navigateurs de les distinguer l'un de l'autre, et de reconnaître ainsi le point de la côte qui est en vue.
Les phares qui n'ont pas besoin d'une très-longue portée, par exemple, ceux qui servent à signaler l'entrée d'un port ou l'embouchure d'un fleuve, sont généralement à feux fixes. Leur lampe, au lieu d'être entourée de plusieurs lentilles, est alors placée dans l'axe d'un cylindre lenticulaire, d'où s'échappe en divergeant une large nappe de lumière, qui éclaire à la fois tous les points de l'horizon.
* Quelques phares, entre autres celui du cap de la Fève, près du Havre, sont maintenant éclairés par la lumière électrique, obtenue au moyen de la machine magnéto-électrique de Nollet. Cette machine n'est autre chose qu'un assemblage de plusieurs appareils de Clarke disposés circulairement sur un bâti de fonte autour d'un arbre horizontal en fer, lequel porte de nombreuses bobines dont l'axe est occupé par un cylindre creux en fer doux. Ces bobines communiquent toutes entre elles, et sont mises en mouvement par une machine à vapeur, qui les fait passer successivement devant les pôles de puissants faisceaux magnétiques en fer à cheval fixés au pourtour de l'appareil sur plusieurs rangées transversales. De là résulte une succession rapide de courants induits, qui, convenable. ment recueillis et dirigés, donnent une lumière des plus vives.






Silice et silicates.



La silice ou acide silicique est composée d'un équivalent de silicium* et de trois équivalents d'oxygène. Cette substance est très-répandue dans la nature. C'est elle qui, à l'état isolé, constitue le quartz, le silex, la pierre meulière, les sables et les grès.
On la trouve en combinaison avec l'alumine, la potasse, la soude, la chaux, l'oxyde de fer, dans un grand nombre de roches ignées ou de sédiment, telles que les granits, les schistes, les argiles, etc. Sous ces différentes formes, la silice représente au moins les trois dixièmes de l'écorce minérale du globe.


Le cristal de roche incolore nous présente l'acide silicique à l'état de pureté parfaite. Il est alors cristallisé en prismes à six pans terminés par des pyramides régulières à six faces, appartenant au système rhomboédrique.
Sa densité est 2,6. Il est fixe et infusible au feu de forge; mais il se ramollit à la flamme du chalumeau à gaz oxygène et hydrogène.
Il est plus dur que le verre et l'acier trempé. Il est insoluble dans l'eau et inattaquable par tous les acides, excepté par l'acide fluorhydrique, qui le transforme en un composé gazeux que l'on désigne sous le nom de fluorure de silicium.
L'acide silicique peut être obtenu artificiellement. Pour cela, on chauffe dans un creuset de platine 1 partie de sable ou de grès pulvérisé et 2 parties de potasse. Le mélange entre en fusion et se transforme en un silicate de potasse soluble dans l'eau (liqueur des cailloux). On dissout la matière dans l'eau bouillante, et on verse dans la dissolution de l'acide chlorhydrique concentré. Cet acide s'empare de la potasse, et précipite l'acide silicique sous la forme de flocons gélatineux. L'acide silicique ainsi obtenu est légèrement soluble dans l'eau; ce qui explique sa présence dans quelques eaux minérales, ainsi que dans la séve de certaines plantes, telles que les graminées, les cypéracées, etc.
L'acide silicique a de nombreux usages. Il entre dans la composition du verre, du cristal, des émaux et des poteries. Nous avons vu qu'il fait également partie des mortiers et autres matériaux de construction.

* Le silicium est un métalloïde qui, par ses propriétés, se rapproche du bore et du carbone. Il est sous la forme d'une poudre brune, plus dense que l'eau, infusible et fixe au feu de forge. Chauffé au contact de l'air ou de l'oxygène, il brûle et se transforme en acide silicique. On l'obtient en calcinant dans un tube de verre un mélange de potassium et de fluorure double de silicium et de potassium.




Télescope de Newton




Les télescopes, qu'il ne faut pas confondre avec la lunette astronomique, bien qu'ils servent au même usage, sont des instruments avec lesquels on produit des images très-amplifiées des astres, en utilisant à la fois la réflexion et la réfraction.

Le télescope de Newton (fig. 286) est formé d'un long tuyau en cuivre au fond duquel est un grand miroir concave M en métal. En regard de ce réflecteur est un petit miroir plan CD, incliné de 45° sur son axe, et placé en avant de son foyer principal F. L'oculaire est une lentille convergente L, enchâssée dans un petit tube latéral, en regard du miroir plan. L'image réelle, qui se formerait au foyer principal du réflecteur M , si le miroir plan n'existait pas, est réfléchie par ce miroir en AB, entre l'oculaire L et son foyer principal. Il en résulte que cet oculaire fait encore fonction de loupe pour donner en A'B' une image renversée et très-amplifiée de l'astre.
 Le télescope de Newton a été perfectionné par Foucault. Cet habile physicien a remplacé le miroir en métal, dont la surface est sujette à se ternir sous l'influence de l'air humide, par un miroir de verre argenté chimiquement. Il a de plus substitué à l'oculaire simple un microscope composé qui permet d'obtenir un plus fort grossissement.

Le carbone



Propriétés physiques
Le carbone est un corps solide, inodore, insipide, infusible et fixe aux plus hautes températures que nous puissions produire par les procédés ordinaires. M. Despretz a cependant démontré que ce corps peut être fondu et même volatilisé, lorsqu'on le soumet à l'action d'une pile très énergique; il prend alors l'aspect et tous les caractères du graphite. Le carbone est insoluble dans tous les liquides, excepté cependant dans la fonte de fer en fusion, qui, en se refroidissant, le laisse déposer en paillettes d'un gris noirâtre. Quant à ses autres propriétés, telles que la couleur, la dureté, la densité, la conductibilité pour la chaleur ou l'électricité, etc., elles différent selon les variétés de carbone que nous allons bientôt décrire.

Propriétés chimiques.
Le carbone, à la température ordinaire, est inaltérable au contact de l'air ; mais à une température plus élevée, il se combine directement avec l'oxygène et donne naissance à deux composés gazeux, l'oxyde de carbone CO et l'acide carbonique CO2. Le carbone se combine aussi directement avec le soufre pour former un produit liquide connu sous le nom de sulfure de carbone. Plusieurs autres corps, tels que l'hydrogène, l'azote, le chlore, le fer, forment avec le carbone des combinaisons très importantes.

Différentes variétés du carbone.
Le carbone se présente dans la nature et dans les arts sous les aspects les plus variés. Ainsi, le diamant, le graphite ou plombagine, le noir de fumée, la houille, l'anthracite, le coke, le charbon de bois, le charbon animal, ne sont que des variétés de carbone auxquelles appartiennent les caractères physiques et chimiques que nous venons de faire connaître, mais qui se distinguent les
unes des autres par des propriétés spéciales que nous allons indiquer.

Diamant.
Le diamant est le plus dur de tous les corps connus, c'est-à-dire qu'il peut les rayer tous sans être rayé par aucun : aussi ne peut-on le polir que par sa propre poussière. Il est généralement limpide et incolore; quelquefois cependant il est rose, bleu clair, vert, jaune et même noirâtre. On le trouve toujours cristallisé sous différentes formes, dont les plus communes sont l'octaèdre, le dodécaèdre rhomboidal et les modifications qui en dérivent. Le diamant est mauvais conducteur de la chaleur et de l'électricité, son pouvoir réfringent est très-considérable; sa densité varie de 3,50 à 3,55. Soumis à l'insolation, il devient phosphorescent. - On trouve le diamant dans l'Inde, au Brésil, en Sibérie et dans les monts Ourals. Il existe dans les terrains d'alluvion anciens, situés à peu de profondeur au-dessous de la surface du sol.
La nature du diamant est restée longtemps inconnue. Newton ayant remarqué que tous les corps combustibles réfractent fortement la lumière, soupçonna le premier sa combustibilité. Mais c'est Lavoisier qui détermina la véritable nature de ce corps, en démontrant que le diamant brûle dans l'oxygène et qu'il forme, comme le charbon ordinaire, de l'acide carbonique. Il résulte d'expériences récemment faites par M. Jacquelin que le diamant soumis à l'action d'une forte pile de Bunsen perd sa transparence, noircit, se ramollit et prend l'aspect du coke. M. Despretz est parvenu, dans ces derniers temps, à obtenir des cristaux microscopiques de carbone en soumettant ce corps à une volatilisation lente au moyen de la pile.

Graphite ou plombagine
C'est cette variété de carbone que l'on emploie pour faire des crayons : on la désigne encore sous le nom de mine de plomb, bien qu'elle ne contienne pas la moindre trace de plomb.
Le graphite est ordinairement cristallisé en lamelles brillantes d'une teinte sombre, souvent noire; il est doux, onctueux au toucher, et laisse sur les doigts et sur le papier des taches d'un gris de plomb. Sa densité est de 2,5; c'est le moins combustible de tous les charbons, sans en excepter le diamant. Le graphite contient toujours une petite quantité de fer à laquelle il doit probablement la propriété qu'il possède de conduire assez bien la chaleur et l'électricité. On le trouve en France, en Angleterre, en Espagne et dans l'ile de Ceylan.
Le graphite, indépendamment de son emploi dans la fabrication des crayons, est encore utilisé dans la galvanoplastie pour métalliser les surfaces des corps mauvais conducteurs, c'est-à-dire pour rendre ces surfaces conductrices de l'électricité, condition indispensable au succès de l'opération. Dans les usages domestiques, on s'en sert pour préserver de l'oxydation les poêles en fonte, les tuyaux, trappes de cheminées, etc.

Noir de fumée
Cette variété de carbone se présente sous la forme d'une poussière noire extrêmement fine. Le noir de fumée est loin d'être du carbone pur; il contient au moins 20 pour 100 de matières résineuses et huileuses dont on peut le débarrasser par la calcination. Cette substance est le produit de la combustion incomplète de certaines matières organiques riches en carbone, telles que les résines, les huiles, les graisses.
Pour obtenir le noir de fumée, il suffit d'exposer un morceau de porcelaine ou une lame métallique au-dessus de la flamme d'une bougie. Dans les arts on le prépare en brûlant des matières résineuses dans de vastes chambres dont les parois sont recouvertes de toiles grossières sur lesquelles il se dépose peu à peu. Le noir de fumée est beaucoup plus combustible que le diamant et le graphite. On l'emploie dans la peinture et pour fabriquer l'encre d'imprimerie et l'encre de Chine.

Houille
La houille ou charbon de terre est opaque, d'un noir brillant, à surface quelquefois irisée. Elle est composée de carbone mélangé à des matières bitumineuses et salines. Elle brûle avec flamme et fumée, en répandant une odeur particulière. Chauffée en vases clos, elle se ramollit, se boursoufle et laisse dégager le gaz qui sert à l'éclairage. On trouve la houille en amas considérables dans le terrain carbonifère.

Anthracite
L'anthracite ou charbon de pierre ressemble assez à la houille. Elle s'en distingue parce qu'elle ne contient pas de matières bitumineuses, qu'elle est beaucoup moins
combustible et qu'elle brûle avec une flamme très-courte, sans fumée et sans odeur. Elle est presque entièrement formée de carbone pur mélangé à une petite quantité de silice, d'alumine et d'oxyde de fer. On rencontre l'anthracite dans les terrains de sédiment anciens, antérieurs au terrain carbonifère.

Coke.
Le coke est le résidu de la distillation de la houille. Il est léger, poreux, boursouflé comme la pierre ponce. Sa couleur est d'un gris noirâtre, avec un léger éclat métallique. Le coke est moins combustible que la houille; il brûle sans flamme ni fumée et en donnant beaucoup de chaleur. Il attire facilement l'humidité de l'air qu'il abandonne dans les temps secs.

Charbon de bois
Le charbon de bois est le résidu de la distillation du bois ou de sa combustion incomplète. Il est noir, inodore, insipide, assez fragile et plus ou moins poreux. Il est très-mauvais conducteur de l'électricité, à moins qu'il n'ait été calciné à une haute température, c'est-à-dire transformé en braise. Le charbon de bois contient toujours un peu d'hydrogène et quelques autres matières, telles que de la silice, de l'oxyde de fer, du carbonate de potasse. Ce sont ces matières qui forment la cendre après la combustion du charbon.
La propriété la plus remarquable du charbon de bois est l'absorption des gaz. Si l'on éteint un morceau de charbon dans du mercure et qu'on l'introduise immédiatement dans une éprouvette remplie d'ammoniaque, d'acide chlorhydrique ou d'hydrogène sulfuré, on voit presque aussitôt le gaz disparaître entièrement et le mercure se précipiter dans l'éprouvette. Tous les gaz sont absorbés par le charbon de bois, mais d'une manière variable selon leur nature. On peut dire en général que l'absorption est d'autant plus facile et plus grande que le gaz est plus soluble dans l'eau. On utilise dans l'industrie cette propriété absorbante du charbon pour désinfecter les eaux corrompues par des gaz délétères et pour s'opposer à la putréfaction des matières animales.
Le charbon de bois décompose l'eau à une température rouge en s'emparant de son oxygène et en mettant l'hydrogène en liberté. Pour opérer cette décomposition on fait passer un courant de vapeur d'eau à travers un tube de porcelaine chauffé au rouge et rempli de braise. Le gaz que l'on recueille dans une éprouvette est un mélange, en proportions variables, d'oxyde de carbone, d'acide carbonique, d'hydrogène pur et d'une très-petite quantité d'hydrogène carboné.
On prépare cette variété de charbon soit par la calcination du bois à l'abri du contact de l'air, soit par sa combustion imparfaite, comme cela se pratique dans les forêts. Ce dernier procédé, connu sous le nom de carbonisation en meules, est le plus ordinaire. On commence par établir (fig. 35) une espèce de cheminée verticale au moyen de quatre montants enfoncés dans la terre. Autour de cette cheminée on place circulairement des morceaux de bois d'un à deux mètres de longueur et superposés de manière à former un cône tronqué ou une espèce de meule sous laquelle on ménage plusieurs conduits horizontaux communiquant avec la cheminée. On recouvre le tout d'une légère couche de terre, afin d'abriter la meule du contact de l'air; puis on y met le feu en jetant dans la cheminée du charbon embrasé et du menu bois. Lorsque la combustion est en activité,' on bouche la cheminée avec de la terre. Bientôt on voit des fumées blanches se dégager de toute la surface de la meule, qui peu à peu s'affaisse sur elle-même. On arrête la combustion dès que la fumée devient bleuâtre et presque transparente, ce qui indique que la carbonisation est achevée. On obtient par ce procédé 17 à 18 pour 400 de charbon, quantité qui ne représente que la moitié environ du carbone que le bois renferme.
(fig. 35)

Charbon animal
Le charbon animal, que l'on désigne encore sous les noms de noir animal, noir d'ivoire, provient
de la calcination des os en vases clos: Il est ordinairement en poudre impalpable ou en grains d'un très-beau noir. Ce charbon ne contient que les 12 centièmes de son poids de carbone pur mélangé à 88 centièmes de phosphate et de carbonate de chaux.
La propriété la plus remarquable du charbon animal est son pouvoir décolorant à l'égard de certains liquides. Si l'on agite pendant quelque temps du vin rouge avec ce charbon, et qu'on filtre ensuite, on obtient un liquide parfaitement incolore. Cette propriété est utilisée dans l'industrie pour dépouiller de leur matière colorante une foule de produits organiques, tels que le sucre de betteraves, les sirops, les alcalis, les végétaux, etc.

Usages du carbone
Les usages du carbone sont très nombreux. A l'état de diamant, il sert non-seulement comme objet de parure, mais encore pour couper le verre, pour tailler et polir les pierres précieuses. Tout le monde connaît l'emploi de la houille, de l'anthracite, du coke, du charbon de bois comme combustibles. En métallurgie, le charbon sert à l'extraction d'un grand nombre de métaux.

Historique
L'acide carbonique est le premier gaz que l'on ait distingué de l'air atmosphérique. C'est Vanhelmont qui en fit la découverte en 1644. Ce médecin, ayant chauffé fortement des pierres calcaires, reconnut qu'il s'en dégageait un air auquel il donna le nom de gaz. Black et Priestley en étudièrent avec soin les propriétés. Mais c'est Lavoisier qui en fit connaître exactement la nature et la composition. L'acide carbonique a été successivement nommé air fixe, air "méphitique, acide crayeux.

Propriétés physiques.
L'acide carbonique est un gaz incolore, transparent, élastique, d'une saveur aigrelette et d'une odeur légèrement piquante. Sa densité est représentée par 1,529. L'eau en dissout environ son volume sous la pression ordinaire, mais sous une pression plus forte, elle peut en dissoudre une quantité qui augmente proportionnellement avec la pression. C'est sur cette propriété que repose la fabrication de l'eau de Seltz artificielle.
L'acide carbonique, à la température de 0° et sous la pression de 36 atmosphères, se liquéfie. C'est un liquide incolore, très-fluide, soluble dans l'alcool et dans l'éther, insoluble dans l'eau. Ce liquide, en passant à l'état gazeux, produit un froid considérable que l'on évalue à environ 70 degrés au-dessous de zéro.
Lorsqu'on dirige un jet d'acide carbonique liquide sur une capsule de verre ou dans une boîte métallique, une portion du liquide se condense sur les parois de la capsule ou de la boîte, et l'on obtient ainsi de l'acide carbonique solide sous la forme de flocons neigeux. La température de ce corps est d'environ 78 degrés au-dessous de zéro, mais on peut l'abaisser davantage en le mélangeant avec de l'éther. L'intensité du froid produit par ce mélange est telle, que des masses considérables de mercure peuvent être congelées en quelques secondes; c'est ainsi que l'on est parvenu à reproduire avec du mercure solidifié des pièces de monnaie, des médailles, des statuettes, etc. L'acide carbonique solide, mis en contact avec nos organes, y produit des effets entièrement semblables à ceux de la brûlure.

Propriétés chimiques.
L'acide carbonique est un acide faible; il colore en rouge vineux la teinture de tournesol. Il éteint les corps en combustion et asphyxie les animaux qui le respirent. Il forme avec l'eau de chaux un précipité blanc de carbonate de chaux, lequel se dissout dans un excès d'acide.
L'acide carbonique est inaltérable à la température la plus haute que nous puissions produire. Une série d'étincelles électriques le décompose en oxygène et en oxyde de carbone.
Parmi les métalloïdes, le soufre, le chlore, l'iode, le brome et l'azote sont sans action sur l'acide carbonique, mais il est décomposé par l'hydrogène et par le carbone à une température élevée. L'hydrogène le transforme en oxyde de carbone en lui enlevant la moitié de son oxygène pour former de l'eau Le carbone le convertit tout entier en un volume double d'oxyde de carbone.
Quelques métaux tels que le fer, le zinc, le manganese en lèvent à l'acide carbonique la moitié de son oxygène pour se convertir en oxydes. Le potassium, le sodium et probablement les autres métaux de la première section, le réduisent entièrement en oxygène dont ils s'emparent, et en carbone, qui devient libre.
L'acide carbonique est un gaz délétère. La plupart des animaux périssent rapidement lorsqu'ils respirent de l'air contenant un cinquième de son volume d'acide carbonique. Les accidents que produisent quelquefois les émanations des fours à chaux et des cuves dans lesquelles fermente le raisin sont dus à l'action toxique de ce gaz.

Composition de l'acide carbonique



Pour déterminer la composition de l'acide carbonique, on fait brûler du charbon dans de l'oxygène pur. On prend un ballon d'environ un litre de capacité que l'on remplit d'oxygène sur une cuve à mercure, et que l'on dispose comme le représente la fig. 36. Au moyen d'un fil de platine, on introduit au centre du ballon un petit fragment de charbon que l'on allume ensuite, en concentrant sur lui des rayons solaires à l'aide d'une forte lentille ou d'un miroir concave. Le charbon brûle rapidement et se transforme en acide carbonique. Lorsque la combustion est achevée et que le gaz a repris sa température primitive, on reconnaît que son volume est resté le même, c'est-à-dire que le volume de l'acide carbonique formé par la combustion du charbon est précisément égal au volume de l'oxygène introduit dans le ballon. On en conclut que le gaz acide carbonique renferme un volume d'oxygène égal au sien.
État naturel. - L'acide carbonique est très-répandu dans la nature. Il fait partie, comme nous l'avons vu, de l'air atmosphérique; on le trouve en dissolution dans plusieurs espèces d'eaux minérales, dont la plus connue est l'eau de Seltz. Il existe à l'état de pureté dans un grand nombre de grottes, entre autres dans la grotte dite du Chien, près de Naples. Cette grotte est ainsi nommée parce qu'elle contient à sa partie inférieure une couche de cinq à six décimètres d'acide carbonique dans laquelle un chien ou tout autre animal de petite taille est promptement asphyxié, tandis qu'un homme peut y respirer sans danger l'air qui est au-dessus.
L'acide carbonique se produit dans la combustion du bois, du charbon, dans la fermentation alcoolique, dans la décomposition spontanée des matières organiques, dans la respiration des animaux. On le trouve en plus grande abondance à l'état de combinaison dans le carbonate de chaux, qui forme la presque totalité des terrains de sédiment. Ainsi toutes les pierres calcaires, les marbres, la craie, les coquilles des mollusques, renferment cet acide combiné avec la chaux. Enfin, il existe encore en combinaison avec quelques autres bases, telles que la baryte, la strontiane, les oxydes de fer, de cuivre, etc.

Préparation de l'acide carbonique.
On pourrait préparer directement l'acide carbonique en faisant brûler du charbon dans de l'oxygène pur; mais ce procédé est d'une exécution difficile et ne donnerait que de petites quantités de ce gaz. On préfère, dans les laboratoires, décomposer le car bonate de chaux par un acide énergique. Pour cela, on prend des fragments de marbre blanc que l'on introduit dans un flacon à deux tubulures et à moitié rempli d'eau (fig. 37). L'une des tubulures porte un tube droit surmonté d'un entonnoir, et dont l'extrémité inférieure plonge dans le liquide; l'autre est munie d'un tube recourbé qui se rend dans une éprouvette propre à recueillir le gaz et reposant sur l'eau. On verse par le tube droit de l'acide chlorhydrique, et l'on voit aussitôt une vive effervescence se produire par suite du dégagement de l'acide carbonique qui se rend dans l'éprouvette. On peut ainsi recueillir en très-peu de temps un volume considérable de ce gaz.





Théorie. - Le carbonate de chaux est composé d'acide carbonique et de chaux. L'acide chlorhydrique, beaucoup plus fort que l'acide carbonique, s'empare de la chaux et met cet acide en liberté. Il se forme du chlorure de calcium, qui reste dissous dans l'eau du flacon, et de l'eau, qui se mélange avec celle-ci.

Remarque. - On pourrait remplacer l'acide chlorhydrique par l'acide sulfurique. Il se formerait alors de l'acide carbonique et du sulfate de chaux.


Mais le sulfate de chaux, étant très-peu soluble dans l'eau, se dépose sur les fragments de marbre, autour desquels il forme bientôt une croûte qui arrête la réaction. Pour éviter cet inconvénient, il faudrait employer, comme on le fait dans les fabriques d'eau de Seliz artificielle, de la craie pulvérisée ou du bicarbonate de soude.

Usages de l'acide carbonique.
L'acide carbonique s'emploie en dissolution dans l'eau. Il forme alors les eaux gazeuses naturelles ou artificielles connues sous le nom d'eau de Seltz. On obtient l'eau de Seltz artificielle en comprimant le gaz acide carbonique dans de l'eau pure, au moyen d'une pompe foulante. On fait encore usage de petits appareils en verre épais, dans lesquels on peut préparer chez soi l'eau gazeuse avec de l'acide tartrique et du bicarbonate de soude pulvérisés.

Production de l'acide carbonique par les animaux.
Production de l'acide carbonique dans la respiration des animaux. - Le phénomène principal de la respiration des animaux est le dégagement constant d'une certaine quantité d'acide carbonique et de vapeur d'eau. Si l'on fait l'analyse de l'air expiré, on trouve en effet qu'il contient plus de vapeur d'eau, un peu moins d'oxygène et plus d'acide carbonique que l'air inspiré. La présence de cet excès d'acide carbonique peut se démontrer facilement en soufflant, au moyen d'un tube de verre tenu entre les lèvres, dans une dissolution d'eau de chaux (fig. 38). On voit bientôt cette dissolution se troubler beaucoup plus qu'elle ne le ferait, dans le même temps, avec la même quantité d'air ordinaire.


Pour expliquer la formation de l'acide carbonique et de la vapeur d'eau dans la respiration des animaux, Lavoisier et Lagrange avaient admis que l'oxygène de l'air, mis en présence du sang veineux dans les cellules du poumon , lui enlevait une portion de son carbone et de son hydrogène , qu'il convertissait sur place en acide carbonique et en vapeur d'eau : de là la transformation du sang veineux en sang artériel, et la production de la chaleur animale. Pour mieux faire comprendre cette grande et belle théorie de la respiration, nous pensons devoir rapporter ici l'éloquent passage consacré par Lavoisier lui-même à son exposition.
« En partant des connaissances acquises et en nous réduisant à des idées simples que chacun puisse facilement saisir, nous dirons d'abord que la respiration n'est qu'une combustion lente de carbone et d'hydrogène qui est semblable en tout à celle qui s'opère dans une lampe ou dans une bougie qui brûle, et que, sous ce point de vue , les animaux qui respirent sont de véritables corps combustibles qui brûlent et se consument.
« Dans la respiration comme dans la combustion, c'est l'air de l'atmosphère qui fournit l'oxygène et le calorique ; mais comme dans la respiration c'est la substance même de l'animal, c'est le sang qui fournit le combustible, si les animaux ne réparaient pas habituellement par les aliments ce qu'ils perdent par la respiration, l'huile manquerait bientôt à la Taupe, et l'animal périrait comme une lampe qui s'éteint lorsqu'elle manque de nourriture.
Les preuves de cette identité d'effets entre la respiration
et la combustion de l'huile se déduisent immédiatement de l'expérience. En effet, l'air qui a servi à la respiration ne contient plus, à la sortie du poumon, la même quantité d'oxygène; il renferme non-seulement du gaz acide carbonique, mais encore beaucoup plus d'eau qu'il n'en contenait avant l'inspiration : or, comme l'air vital ne peut se convertir en eau que par une addition d'hydrogène ; comme cette double combinaison ne peut s'opérer sans que l'air vital ne perde une partie de son calorique spécifique, il en résulte que l'effet de la respiration est d'extraire du sang une portion de carbone et d'hydrogène, et d'y déposer à la place une portion de son calorique spécifique , qui, pendant la circulation, se distribue avec le sang dans toutes les parties de l'économie animale, et entretient cette température à peu près constante que l'on observe dans tous les animaux qui respirent.
« On dirait que cette analogie qui existe entre la respiration et la combustion n'avait point échappé aux poètes ou plutôt aux philosophes de l'antiquité, dont ils étaient les interprètes et les organes. Ce feu dérobé du ciel, ce flambeau de Prométhée, ne présente pas seulement une idée ingénieuse et poétique, c'est la peinture fidèle des opérations de la nature. On peut donc dire, avec les anciens , que le flambeau de la vie s'allume au moment où l'enfant respire pour la première fois, et qu'il ne s'éteint qu'à la mort.
« En considérant des rapports si heureux, on serait quelquefois tenté de croire qu'en effet les anciens avaient pénétré plus avant que nous ne le pensons dans le sanctuaire des connaissances, et que la Fable, comme quelques auteurs l'ont pensé, n'est qu'une allégorie sous laquelle ils cachaient les vérités de la médecine et de la physique. » (LAVOISIER, Mémoires de chimie.)
Ainsi le phénomène de la respiration est une véritable combustion entièrement analogue aux combustions ordinaires. Cette grande idée de Lavoisier n'a été que de plus en plus confirmée par les travaux modernes. Toutefois l'illustre chimiste plaçait le siège de cette combustion dans les poumons. MM. Edwards et Magnus ont démontré depuis que ce n'est pas dans le poumon seulement qu'elle s'opère, mais dans tout l'appareil circulatoire. Le sang veineux arrivé dans le poumon absorbe l'oxygène inspiré et dégage l'acide carbonique dont il est chargé pour se transformer en sang artériel. Ainsi pourvu d'oxygène, le sang artériel retourne au cour, qui le lance dans les artères et de là dans les vaisseaux capillaires, où s'opère la formation de l'acide carbonique que dissout et qu'entraîne le sang veineux.

D'après MM. Dulong et Despretz, la combustion respiratoire ne représenterait que les neuf dixièmes de la chaleur animale produite ; mais M. Dumas a démontré depuis que, conformement aux idées de Lavoisier, toute la chaleur animale provient de la respiration et qu'elle peut se mesurer d'après les quantités de carbone et d'hydrogène brûlés pendant cet acte.
Il résulte d'analyses récentes qu'un homme de force moyenne consomme en 24 heures 592 grammes d'oxygène pour brûler 166 grammes de carbone et 19 grammes d'hydrogène, ce qui donne environ 307 litres d'acide carbonique et 171 grammes d'eau. Le volume d'acide carbonique expulsé dans chaque expiration représente les 4 centièmes du volume d'air expiré.

Décomposition de l'acide carbonique.


Décomposition de l'acide carbonique dans les plantes.
Les végétaux respirent comme les animaux; mais leur respiration se fait pour ainsi dire en sens inverse. En effet, tandis que les animaux absorbent l'oxygène de l'air atmosphérique pour brûler du carbone et former de l'acide carbonique, les végétaux au contraire absorbent l'acide carbonique et le décomposent pour fixer dans leurs tissus le carbone et dégager l'oxygène.
Toutefois cette décomposition de l'acide carbonique par les plantes a besoin, pour se produire, de l'influence directe des rayons solaires. Si l'on place des feuilles vivantes sous une cloche remplie d'eau (fig. 39) et qu'on les expose au soleil, on voit bientôt des bulles de gaz se détacher de leur surface et se réunir à la partie supérieure de la cloche. En recueillant ce gaz et en l'analysant, on constate qu'il est essentiellement formé d'oxygène pur. On a reconnu par des expériences précises que cet oxygène provient de la décomposition de l'acide carbonique contenu dans les feuilles. Selon les analyses de Saussure, les deux tiers seulement de l'oxygène sont exhalés par la plante, tandis qu'un tiers est retenu pour servir à sa nutrition.
Dans l'obscurité et même à la lumière diffuse, un phénomène inverse se produit. La plante absorbe de l'oxygène et dégage de l'acide carbonique. La quantité d'acide carbonique expiré est d'autant plus grande que la lumière est moins intense ; mais, dans tous les cas, elle est toujours plus petite que celle de l'oxygène absorbé. On a considéré pendant longtemps l'acide carbonique exhalé par la plante dans l'obscurité comme étant formé par elle aux dépens de son propre carbone et de l'oxygène de l'air ; mais M. Dumas et un grand nombre de chimistes pensent aujourd'hui que cet acide carbonique est celui que les racines ont absorbé dans le sol, et qui traverse simplement la plante sans être décomposé.
En résumé, le phénomène essentiel de la respiration des végétaux consiste dans la décomposition, sous l'influence de la lumière solaire, de l'acide carbonique absorbé par les feuilles dans l'atmosphère ou puisé par les racines dans le sol ou dans les engrais. Cette décomposition s'effectue uniquement dans les parties vertes. L'oxygène est exhalé, tandis que le carbone , se combinant avec les éléments de l'eau, va former les principes immédiats dont se composent les tissus fondamentaux de la plante *.